En sortant de la maison, l’émotion est trop forte. Je pense à mon père dans le camp de concentration, à tout ce qu’il a enduré. Dora. Mauthausen. Tous ces millions de morts. Et pas lui. Je pense à toi, papa. J’écris ces quelques lignes et tu remplis toutes mes pensées. Léa m’a appelé ce matin, et je me rends compte de tout l’amour que j’ai pour elle. Anne Frank avait un peu plus de son âge. Sa chambre est universelle. Elle est la chambre de toutes les adolescentes du monde. Tu as survécu, papa, mais elle, elle est morte à Bergen-Belsen, emportée par le typhus. Mon esprit ne peut se détacher de ces quelques marques de croissance tirées à la règle sur la tapisserie de la chambre de sa mère. Mon dieu, qu’elle était déjà grande ! Et j’ai pensé à Léa. Les temps sont durs, la crise n’en finit pas, et le diable reste tapi dans l’ombre, prêt à sauter sur la proie de la démocratie. J’ai peur pour elle.