Comment s’y rendre ?
El Jem se situe entre Sousse et Sfax, à proximité de l’autoroute A1. Une sortie d’autoroute se trouve à 3 km; elle est indiquée. Il faut environ 2h 30 de route depuis Tunis, 1h 30 depuis Hammamet, une heure depuis Kairouan, Sousse, Monastir, Mahdia et Sfax.
Toutes les grandes villes desservent El Jem, avec des départs réguliers. A Tunis, le départ se fait à la station de Moncef Bey, prévoyez 2h 30 environ. La gare de louage d’El Jem se situe à 500 mètres environ de l’amphithéâtre
Prix d’entrée :
Ouvert tous les jours de 7h30 à 17h30 en hiver (18h30 en été).
Billet groupé avec le musée : 10 dinars.
El Jem, le colisée romain le mieux conservé d'Afrique
Mardi 15 mars 2011. Bientôt 13 heures. Il est grand temps de quitter Kairouan pour prendre la route d’El Jem où se trouve le plus grand colisée romain d’Afrique du Nord, le troisième du monde antique, après Rome et Capoue. Une heure de route plus tard, me voici au pied du monument.
Tiraillé entre l’envie de le visiter aussitôt et l’appel du ventre, je n’hésite pas un instant… On passe à table ! Cela tombe bien, un restaurant se dresse au pied du monument. Depuis sa terrasse, la vue sur le colisée est saisissante. Pas de fantaisie, les briques m’écœurent, du coup je me régale de côtes d’agneau tandis qu’une colonie de chats errants miaulent autour de la table en essayant de mendier quelques restes. Ils ont tellement faim qu’ils menacent à chaque instant de sauter sur la table pour me voler ma viande ! Quelle importance, la vie me semble si douce aujourd’hui, les souvenirs de France s’éloignent. Je suis le seul touriste du coin à avoir bravé les affres de la révolution pour visiter le colisée. La désertion des touristes étrangers m’offrent cette chance unique d’avoir El Jem pour moi tout seul.
Le monument se dresse devant moi, ses murs épais, son arène encore très bien conservée, ses tribunes ocres, ses arcades, ses coursives, ses coulisses, et même ses galeries souterraines qui révèlent encore les cellules des gladiateurs et des sacrifiés, ses cages à lions. Ici, nous sommes sur le site antique de Thysdrus, l’une des villes les plus riches de la Tunisie romaine, qui compta à son apogée près de 40.000 habitants. Hélas, après le sac de la ville par les armées de l’empereur après que les habitants se révoltèrent contre la fiscalité trop pesante, ce fut au tour des envahisseurs arabes de pratiquer la politique de la terre brûlée contre les résistances berbères. Le déclin se poursuivit. Réduite à son amphithéâtre, la ville devint un immense château fort.
Le site est tout simplement exceptionnel, d’une puissance émotionnelle rare, unique, avec ses trappes à lions qui surgissent encore du sable de l’arène et ses tribunes qui pouvaient accueillir jusqu’à 35.000 spectateurs assoiffés de sang et de jeux mortels. Edifié à partir du IIe siècle ap. J.-C., le colisée d’El Jem affiche 149 mètres de long pour 124 de large et presque 430 mètres de circonférence. Il surpasse les arènes de Nîmes et même celles d’Arles. Sa forme elliptique est d’une beauté inouïe.
Il comporte des innovations techniques par rapport aux autres amphithéâtres romains. Les coulisses se trouvent directement sous le sol de l’arène, les fauves étant montés par les deux ouvertures pratiquées à la surface de la piste. Le système et les unités de mesure utilisés pour bâtir le monument sont puniques et non romains. Le style du bâtiment mêlent l’art romain et africain. Le pourtour de l’arène était recouvert de marbre.
Plus tard, après la chute de l’empire romain, le colisée fut pendant trois ans la forteresse de la princesse Kahina. De confession juive, elle commandait une fédération de tribus berbères tentant de résister à l’envahisseur arabe, vers 647. Elle aurait été trahie par son jeune amant qui la poignarda et envoya sa tête embaumée au calife de Bagdad. Beaucoup plus tard, en 1695, les partisans d’Ali Bey y trouvèrent refuge face aux troupe de Mohamed Bey. Ce dernier, pour les déloger, n’hésita pas à tirer quelques coups de canon sur l’amphithéâtre-forteresse, ce qui valut à l’édifice d’être en partie détruit… Hélas.
Le site est tellement beau que je reste là presque deux heures à arpenter ses tribunes, grimpant et descendant, m’imaginant un instant à la place des gladiateurs et des chrétiens dévorés par les fauves sous les acclamations et la stupeur morbide des spectateurs. Quelle terreur ce devait être alors pour celui qui montait brusquement dans l’arène et qui observait la foule en délire assoiffée de son sang. J’en frissonne encore.